L'Ethique
de la copie de tableaux de maître :
Avant
tout, la copie n'est en aucune manière à confondre avec
un faux.
Une
copie est une oeuvre tout à fait légale qui reproduit
le plus fidèlement possible une toile de maître dépendant
du domaine publique ou bien avec l'autorisation de l'artiste ou des
ayant-droit lorsque celle-ci n'est pas encore dans le domaine publique.
Une copie est toujours identifiée de manière claire et
permanente, et le plus souvent d'une taille différente de l'original
de manière à ne pas pouvoir être confondue avec
celui-ci. La copie a toujours été pratiquée depuis
l'antiquité par les peintres pour apprendre les techniques de
leurs aînés, pour prendre la place d'originaux qui risquent
d'être dérobés dans des lieux publiques ou pour
satisfaire les amateurs d'arts qui ne peuvent s'offrir des originaux
extrêmement coûteux.
Un
faux est une toile présentée comme un original
alors qu'elle est en fait une copie ou plus fréquemment une toile
"à la manière de" et présentée
comme une toile inconnue d'un grand maître. Le faux est bien sûr
une activité illicite, un déli puni par la loi et lèse
les artistes, leurs ayant-droit et les acheteurs qui se font abuser.
Certains faussaires peuvent être très performants et il
est parfois très difficile d'identifier un faux.
Je
suis, comme tous les membres de l'Association des Copistes des Musées de Français
extrêmement pointilleux sur l'aspect légal de mes copies
et le respect des droits artistiques. L'A.C.M.F. s'est donné
comme objectif de promouvoir la copie de qualité et de garantir
l'éthique professionnelle de ses adhérents.
Attention
:
Il existe sur le marché et particulièrement
sur internet des copies industrielles qui sont
réalisées principalement dans les pays de l'Est
et en Asie. Ces copies sont parfois réalisées à
la chaîne par des ouvriers surexploités qui réalisent
parfois plusieurs dizaines de copies par jour !
Elles présentent évidemment
une très pauvre qualité
et n'ont rien à voir avec les véritables
oeuvres d'art réalisés par un maître copiste.
Accrocher une belle copie de Van Gogh c'est comme accrocher l'original
dans votre salon.
La différence entre une copie
industrielle et une copie de musée
est celle que l'on peut observer entre une prostituée et
une belle histoire d'amour, ou bien
entre un trois étoiles Michelin et un fast food...
ne vous laissez pas abuser.
une vraie copie demande plusieurs semaines (voir plusieurs mois)
de travail et ne peut pas être vendues 200 ou 300€.
Nous ne sommes plus dans le domaine de l'art mais dans celui de
l'industrie du bas de gamme. |
Michel,
au travail salle Van Gohg, Musée d'Orsay. |
Quelques
éléments de technique :
Le
support : Une bonne copie sera réalisée
sur le même support que l'original, une toile de lin, un
panneau de bois, un papier maroufflé etc. Lorsque les oeuvres
copiées sont de la fin du IXXème ou début
du XXème siècle je peux travailler sur des découpes
de draps de lin d'époque, récupérés
dans les armoires de nos grand-mères (hé oui, en
ce temps-là, les tissus étaient faits pour durer
...).
L'enduit
: Pour recevoir correctement la peinture le support doit être
enduit, soit d'un mélange de colle de peau de lapin et
de blanc de Meudon, soit à base de colle de caseïne,
soit de produits plus modernes comme le Gesso. Le respect du type
d'enduit est primordial pour rendre à la copie exactement
le même aspect que l'original. Certaines toiles peuvent
demander plusieurs couches d'enduit poncées entre chaque
couche. |
Toiles
de lin de la fin du 19eme sciècle. |
La
peinture : La plupart des copies sont réalisées
avec des couleurs à l'huile, et de toutes façons avec
le type de peinture utilisée par le maître que l'on copie.
Pour ma part, j'utilise généralement des couleurs "Rembrand"
de la marque "Tallens" qui me donnent pleine satsfaction.
Le
medium : Le medium est le liquide utilisé pour "porter"
la peinture sur la toile, pour lui donner son aspect lisse ou rugueux,
mat ou brillant, fin ou empâté. Il est généralement
composé en grande partie d'huile (souvent de lin) mélangée
avec une proportion de solvant (essence de thérébentine
par ex.), d'autres additifs comme des vernis, et d'autres produits (thérébentine
de Venise etc.). Il est important pour un rendu maximum de connaître
les habitudes du maître à copier pour retrouver le même
aspect final de la copie.
Le
dessin : Dans la presque totalité des cas, la première
phase de travail va être de reporter sur la toile le dessin des
principales formes de l'oeuvre à copier. Il s'agit rarement d'un
dessin précis mais plutôt de la mise en place des volumes.
Ce dessin peut être réalisé par une mise au carreau
(grille de recopie) ou bien avec des techniques plus modernes comme
la projection d'une diapositive ou d'une photo numérique avec
vidéo-projection.
La
mise en couleur : C'est bien sûr la phase la plus longue
de la copie. Elle est réalisée en musée devant
l'original ou en atelier devant photo. Le travail du maître étant
souvent constitué de plusieurs couches de peinture superposées
et qui réagissent entre elles. Le copiste va analyser la succession
de ces couches pour les reproduire successivement et ainsi obtenir le
rendu le plus fidèle. Le plus souvent, ce travail s'effectue
en trois couches avec la technique dite de "gras sur maigre",
garante d'une bonne tenue de la matière dans le temps. Parallèlement
à la couleur, le copiste s'évertue à reproduire
la touche du maître (la manière dont celui-ci travaille
sa peinture, avec quel type de brosse ou de pinceau, avec quelle énergie
ou subtilité ...) ainsi que l'exactitude absolue des formes et
détails.
Le
séchage : Il est souvent nécessaire de marquer
des pauses entre les couches pour permettre un séchage partiel
ou complet des couches inférieures.
Le séchage final sera d'au moins deux semaines
avant de remettre sa copie au client et d'une année avant d'appliquer
un éventuel vernis.